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"Le Baron perché" d'Italo Calvino

Publié par Maud GUILLEN sur 3 Mars 2013, 15:33pm

Le Baron perché est un conte philosophique et fantaisiste, appartenant avec Le Vicomte pourfendu et Le chevalier inexistant à la trilogie Nos ancêtres. Le Baron perché, se dit El Barone rampante dans la langue de son auteur italien, Italo Calvino, aussi philosophe, scénariste et grande figure de la littérature italienne du XXème siècle. Connu aussi pour sa lutte antifasciste, il prit position au côté de la résistance durant la Seconde Guerre mondiale : en 1947 est publié son premier roman, Le Sentier des nids d’araignées, empreint de cette expérience en tant que résistant, de son influence néoréaliste et plus singulièrement de son goût de plus en plus prononcé pour la fable.

Dans Le Baron perché, les premières pages débutent par un événement précisément daté, le 15 juin 1767, comme si nous assistions à un événement historique. Une révolution? Si s’en est une, Côme Laverse du Rondeau en est le révolutionnaire. Aîné d’une famille noble, il n’a alors que douze ans, lorsque avec son petit frère Blaise, ils assistent pour la première fois au repas en compagnie des adultes : leur père, le baron Arminius Laverse du Rondeau, leur mère, surnommée la Générale, l’abbé Fauchelafleur, janséniste chargé de leur éducation, leur sœur Baptiste et enfin, en bout de table, le Chevalier Avocat Carega, leur oncle. Est-ce les remontrances directives de la Générale, l’abnégation de Blaise, le plat d’escargot, les bonnes convenances où naissent la désagréable sensation de n’être plus enfant et de ne pouvoir jamais être libre qui poussèrent Côme à séparer son destin de celui de sa famille ? Blaise, dont le rôle du narrateur fut attribué, nous dit : « La table, on le comprend, était le lieu où se révélaient tous nos antagonismes, toutes nos divisions, toutes nos folies aussi et toutes nos hypocrisies. Ce fut à table que se décida la révolte de Côme. On m’excusera donc de m’attarder dans mon récit : nous ne trouverons plus de tables bien dressées dans la vie de mon frère, on peut en être certain». Les discussions qui tendent à la dispute, où les vociférations finissent par masquer le bruit des couverts est un phénomène très connu et de tout temps ; allez savoir pourquoi les tables, les chaises et les couverts font, eux aussi, partie de l'artillerie de guerre. Gare aux boulettes de viandes et autres missiles gastronomiques! Dans la guerre, il y a aussi l'exil ; or dès le 15 juin 1767 Côme vivra dans les arbres et n’en descendra sous aucun prétexte que ce soit pour le mariage de sa sœur, l’enterrement de ces parents ou bien même au nom de l’amour. Comme les feuilles d'automnes, il quittera les arbres la mort venue.

Le livre nous dit que « pour bien voir la terre, il faut le regarder d’un peu loin ». Dans les hauteurs des arbres, Côme puisera dans sa différence, chassant mieux que quiconque, se passionnant de littérature et d’érudition, faisant preuve de dextérité et d’innovation qui permettra l’édifice stable de son perchoir. On peut percevoir ce garçon devenu homme, allant de branches en branches, agile comme un singe et désireux de liberté à la manière de Voltaire, Diderot et Rousseau. Les lettres sous nos yeux, au moment même où nous lisons, laissent apparaître leurs formes comme des branches et des troncs auxquels nous nous agripons, sentant les pages du livre issus des arbres, au contact de nos mains. Italo Calvino fait de la liberté un objet accessible aux sens à travers le livre et à l’esprit à travers la littérature. Italo Calvino disait que "la littérature ne pouvait vivre que si elle se fixe des objectifs démesurés", ce qu'il a omis en parlant de démesure est que son livre est une résurrection.

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